Recherche Internet : la jeune génération est-elle vraiment différente ?

La Gen Z est parfois, voire souvent décrite comme une génération ultra-connectée, influencée par les réseaux sociaux et peu encline aux efforts. Et avec la génération Alpha suivante, certains craignent un fossé toujours plus grand avec les générations précédentes. Mais cette vision est-elle réellement fondée ?

En France, la perception des jeunes est en partie influencée par des études étrangères, notamment anglo-saxonnes, largement reprises dans les médias. Des enquêtes locales existent, mais elles restent moins visibles, contribuant ainsi à des jugements parfois biaisés. Pour mieux comprendre les habitudes de recherche en ligne des plus jeunes, Ranxplorer a mené une étude exploratoire auprès de jeunes de 12 à 25 ans. Sans prétendre être totalement représentative, elle permet de décrypter certaines tendances et d’apporter un éclairage plus local sur leurs comportements et leur rapport aux médias et aux réseaux sociaux.

Recherche Internet : la jeune génération est-elle vraiment différente ?

Définitions : Génération Z et génération Alpha

Tout d’abord, rappelons brièvement ce que sont les générations Z et Alpha.

DéfinitionsAnnées de naissanceÂge en 2025Principales caractéristiques
Génération Z~1997 – 2010/2012De 12/14 à 27 ansDigital natives, à l’aise avec les réseaux sociaux, en quête de sens dans leur travail, sensibles aux questions écologiques et sociétales.
Génération Alpha~2010/2012 – 2025De 0 à 12/14 ansNée dans un monde ultra-connecté, familiarisée avec l’IA et les assistants vocaux, consommation majoritaire de contenus courts et interactifs.

Comment les jeunes recherchent-ils de l’information ?

La jeune génération est effectivement plus à l’aide avec l’outil Internet que leurs aînés. Mais gare aux idées reçues ! Elle ne se fie pas uniquement aux réseaux sociaux pour s’informer.

Les moteurs de recherche restent la référence

Lorsqu’il s’agit de chercher une définition ou d’en apprendre davantage sur un sujet, les jeunes disposent de nombreux choix : Google, Wikipedia, ChatGPT, TikTok, YouTube… Mais quels sont leurs réflexes en priorité ?

  • Les moteurs de recherche sont largement privilégiés : 4 jeunes sur 5 affirment utiliser Google ou un autre moteur alternatif comme premier outil.

Cependant, ils aiment compléter leurs recherches avec d’autres plateformes.

  • Les agents conversationnels comme ChatGPT sont utilisés par environ 50% des jeunes, avec une préférence plus marquée chez les 12-15 ans. Pour cette tranche d’âge, ils sont même 25% à privilégier l’IA pour les recherches de définition.
  • TikTok et YouTube sont moins utilisés pour les recherches de définitions ou comme moteur de réponse pour des sujets spécifiques. Ces plateformes vidéo représentent un peu moins de 20% des recherches effectuées.
  • Quant à l’encyclopédie en ligne collaborative Wikipedia, elle n’est pas perçue comme un réflexe chez les plus jeunes. Moins de 15% pensent à Wikipedia pour rechercher une définition.
Comment les jeunes recherchent-ils de l’information ?

Comment choisissent-ils les résultats sur lesquels cliquer ?

Lorsqu’ils recherchent des informations, les jeunes suivent des critères spécifiques pour sélectionner les résultats sur lesquels ils vont cliquer.

  • Les premiers résultats ont la cote : près de 40% des jeunes déclarent cliquer systématiquement sur les premiers résultats affichés.

Cela témoigne d’une grande confiance envers l’algorithme des moteurs de recherche. Cependant, cette tendance varie légèrement selon l’âge. Ce sont surtout les plus jeunes qui sont particulièrement enclins à cliquer sur les premiers résultats de la SERP.

  • La vérification des sources est un réflexe moins courant, mais il est tout de même pratiqué par environ 25% des jeunes. Ces derniers prennent le temps de vérifier le site avant de cliquer.
  • Environ 10% des jeunes préfèrent éviter Google et optent directement pour des outils comme ChatGPT ou d’autres plateformes comme TikTok pour leurs recherches. Ces jeunes n’ont pas besoin de cliquer sur des liens, car ces canaux fournissent directement des réponses.

Les achats en ligne

Les habitudes de shopping en ligne des jeunes ne diffèrent pas radicalement de celles des générations précédentes.

  • Amazon et les applications dédiées en tête : la jeune génération plébiscite Amazon et les applications de shopping comme premier réflexe pour acheter ou faire acheter un produit par leurs parents.
  • Des achats souvent influencés par les réseaux sociaux : plus de 70% reconnaissent que les influenceurs, les avis en ligne et les commentaires d’autres utilisateurs influencent leurs choix, que ce soit pour des sorties, des vêtements ou d’autres achats.
  • Google Shopping : son usage devient plus fréquent à mesure que l’on vieillit, notamment chez les jeunes adultes.
  • La recherche par image et les agents conversationnels encore marginaux : moins de 10 % des jeunes utilisent ces outils pour leurs achats en ligne.

L’influence des réseaux sociaux

Les réseaux sociaux ont radicalement transformé la manière dont les jeunes s’informent. Si ces plateformes offrent une grande variété d’informations, elles sont également un terreau fertile pour les fausses informations.

L’influence des réseaux sociaux

Les réseaux sociaux comme source d’information

Les jeunes utilisent de plus en plus les réseaux sociaux non seulement pour le divertissement, mais aussi comme source d’informations. Que ce soit sur Instagram, Twitter, TikTok ou YouTube, ces plateformes sont devenues incontournables pour s’informer sur l’actualité, les tendances ou même des sujets plus profonds.

  • Un usage fréquent des réseaux sociaux pour l’information : Près de 20% des jeunes interrogés affirment utiliser régulièrement les réseaux sociaux comme source principale d’information, ce qui montre une réelle tendance à consulter ces plateformes pour des informations quotidiennes.
  • L’attrait pour des contenus plus visuels : Bien que les moteurs de recherche restent la référence pour des informations précises, environ 5% des jeunes utilisent YouTube pour des recherches plus approfondies.

L’importance croissante des contenus UGC

Une autre tendance marquante dans les habitudes de recherche des jeunes concerne les contenus générés par les utilisateurs, également appelés UGC (User Generated Content). Sur TikTok, Instagram ou YouTube, ce sont souvent des vidéos, commentaires ou avis partagés par d’autres internautes qui attirent leur attention. Ces contenus sont perçus comme plus spontanés, plus authentiques, et surtout plus proches de leur réalité.

Qu’il s’agisse d’un produit, d’une actualité, d’un conseil ou d’une explication, les jeunes générations privilégient volontiers une vidéo ou un avis publié par une personne « comme eux », plutôt qu’une fiche produit ou un article institutionnel. C’est ce qui explique, en partie, la popularité croissante de plateformes comme TikTok ou Reddit utilisées comme moteurs de recherche alternatifs.

L’UGC ne se limite pas à une influence commerciale. Cette recherche d’information, basée sur l’expérience partagée, traduit un besoin de proximité et de confiance. En revanche, elle brouille parfois les repères entre contenu informatif, opinion personnelle et divertissement, ce qui peut compliquer la vérification des faits.

L’exposition aux fausses informations

Sur les réseaux sociaux, nous sommes souvent confrontés à de fausses informations, qu’il s’agisse de rumeurs ou de contenus manipulés.

L'exposition aux fausses informations
  • Conscience des fausses informations : plus de 60% des jeunes ont déjà vu une rumeur ou une fausse information se propager sur les réseaux sociaux.
  • Fiabilité des sources : Plus de 80% des jeunes considèrent que la fiabilité des informations dépend des comptes ou des sources d’où elles proviennent.
  • Refus de partager des informations douteuses : Malgré cette exposition, une grande majorité (plus de 55%) des jeunes affirme ne pas partager des informations douteuses ou non vérifiées.
  • Partage sans vérification : toutefois, environ 20% des jeunes admettent avoir partagé des contenus sans vérifier leur véracité au préalable ou en précisant qu’ils ne savaient pas si l’info était fiable.
  • Recherche de validation auprès de proches : environ 20% préfèrent se tourner vers une personne de confiance (parent, ami, professeur) pour valider l’information avant de se faire une opinion.

Face à cette exposition croissante, certaines écoles font appel à des intervenants pour sensibiliser les jeunes. 60% des personnes interrogées disent avoir reçu des conseils à l’école, de leur entourage ou sur Internet.

Exemples de rumeurs

Les jeunes générations sont particulièrement exposées aux rumeurs et fausses informations sur les réseaux sociaux. Si certaines peuvent prêter à sourire, elles sont parfois aussi des tentatives de déstabilisation. C’est pourquoi de nombreux médias sérieux publient régulièrement des articles pour corriger ces informations. Cependant, ces hoax continuent de se propager, alimentant les débats et les recherches en ligne.

Parmi les rumeurs citées par la jeune génération, nous avons :

  • Des rumeurs sur un nouveau confinement
  • De fausses informations sur des célébrités
  • Des images manipulées par l’IA avec des photos et des vidéos truquées, largement diffusées sur TikTok et d’autres plateformes.

Pour illustrer l’impact et la propagation des fausses informations, nous avons analysé deux rumeurs spécifiques.

L’une des fake news les plus persistantes en France concerne Brigitte Macron et une prétendue transidentité. Cette désinformation, qui refait surface régulièrement, a même été reprise par une influenceuse américaine en février 2025, malgré la condamnation pour diffamation des deux femmes à l’origine de cette rumeur en septembre 2024.

Sur Ranxplorer, nous observons que les recherches sur « Brigitte Macron » possèdent une thématique de recherche autour de « Trogneux » et du nom « Jean-Michel Trogneux ».

Rappel : Brigitte Macron n’est pas une femme transgenre et ne s’appelait pas à l’origine Jean-Michel Trogneux. Son nom de naissance est bien Brigitte Trogneux, et Jean-Michel Trogneux est son frère.

Une autre rumeur qui a captivé les réseaux sociaux, et celle du Listenbourg.

Rappel : Le Listenbourg est un pays inventé par un internaute pour se moquer du manque de culture géographique des Américains. Ce faux pays européen était présenté comme une extension de la péninsule ibérique.

Le Listenbourg a alimenté de nombreuses discussions en ligne. Cette fake news a pris une telle ampleur que certains sites ont créé des pages pour parler de la beauté de ce pays et profiter de la tendance pour booster leur SEO. Des internautes amusés ont même créé des comptes officiels sur les réseaux sociaux, un hymne national, un drapeau, et une page Wikipédia pour entretenir la rumeur.

D’ailleurs sur Google Trends, nous avons un aperçu de ce phénomène viral.

Ces exemples montrent que, même si une grande partie des jeunes reconnaît l’existence de fausses informations, elles continuent de circuler à grande vitesse et nourrissent des recherches en ligne, souvent motivées par la curiosité ou le désir de vérifier des informations sensationnelles.

Pour résumer, bien que l’étude des comportements de recherche en ligne des jeunes générations mette en évidence certaines spécificités liées à l’usage des outils numériques, force est de constater que leurs pratiques ne sont pas radicalement différentes de celles des générations précédentes. Les jeunes, tout comme le reste des internautes, utilisent une variété d’outils pour s’informer et cherchent activement des réponses à leurs questions, qu’il s’agisse des réseaux sociaux ou des moteurs de recherche. Leur relation à l’information semble donc être plus une question d’adaptation aux technologies disponibles que d’une rupture totale avec les habitudes des générations antérieures.

Cependant, l’exposition aux fausses informations et la propagation de rumeurs demeurent un défi majeur. Malgré une prise de conscience croissante face à cette problématique, une partie des jeunes continue de partager des contenus non vérifiés, souvent poussés par la curiosité ou l’effet de groupe.